TÉMOIGNAGE (1/2)
Yanek Lauziere-Fillion et Chantale Vaillancourt
Le dimanche après Noël, l’Église célèbre la fête liturgique de la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph.
C’est une fête qui s’est développée à partir du 19e siècle au Canada, puis dans toute l’Église à partir de 1920. C’est une fête qui vise à montrer la Sainte Famille de Nazareth comme «le vrai modèle de vie» dont nos familles peuvent s’inspirer et où elles peuvent trouver aide et réconfort. (Vatican News)
À cette occasion, le père Tony a invité deux couples de la paroisse à venir témoigner à la messe de 11h ce dimanche 29 décembre 2024.
Chantale et Yanek, dans la jeune quarantaine, parents de trois enfants, racontent leur périple depuis leurs «origines familiales athées, leur amour de l’art et de l’histoire» à un cheminement de foi en Église.
Mado et François, parents de trois jeunes adultes, témoignent de la bonté de Dieu qui les a conduits et accompagnés dès leurs fiançailles jusqu’à aujourd’hui.
Pour votre joie, nous présentons, tour à tour, le récit de leur témoignage.
Yanek : Nous sommes humblement devant vous ce matin, loin d’être parfaits, pour vous raconter quelques événements de notre cheminement de foi familial. Nous croyons que Chantale est habitée par la recherche du beau, tandis que je suis habité par la recherche du vrai.
Avez-vous remarqué que notre époque est marquée par la recherche de petits plaisirs hédonistes et confortables? Cette année, l’expression à la mode pour se souhaiter de Joyeuses Fêtes, c’est de «profiter des petites douceurs de la vie».
Pourtant c’est par la souffrance, les tempêtes et des deuils que notre famille a le plus appris. Ayant grandi dans un contexte social marqué par une revendication des droits et de la liberté individuelle, par l’épanouissement personnel, nous avions tout d’abord l’habitude de nous appuyer sur des veaux d’or pour sortir la tête de l’eau, car nous ignorions la présence de Dieu dans nos vies. Certains diraient que ce sont d’heureux hasards qui nous ont menés à une conversion adulte, mais nous croyons que c’est l’Esprit Saint qui sait trouver son chemin. Pour nous, cela s’est manifesté par le biais de songes ou de signes.
Chantale : En 1984, quelques années après notre naissance à Yanek et moi, Jean-Paul II écrivait :
«À propos du mariage et de la famille, il ne manque pas d’indices d’une dégradation préoccupante de certaines valeurs fondamentales. À la racine de ce phénomène négatif, il y a souvent une corruption du concept et de l’expérience de la liberté, celle-ci étant comprise non comme la capacité de réaliser la vérité du projet de Dieu sur le mariage et la famille, mais comme une force autonome d’affirmation de soi, assez souvent contre les autres, pour son bien-être égoïste.»
C’est effectivement entouré de ces conceptions sociales que nous avons grandi.
Yanek et moi nous sommes connus en l’an 2000. Nous étions collègues de travail chez Réno-Dépôt à Rosemère. Nous avons travaillé deux ans ensemble et développé une amitié, ayant en commun nos origines familiales athées, notre amour de l’art et de l’histoire.
Nos chemins se sont séparés lorsque Yanek déménagea à Montréal.
Bien des années plus tard, ce sont nos blessures qui ont permis nos retrouvailles: Yanek souffrait de maux de dos et s’est rendu sans le savoir sur mon lieu de travail à la clinique-chiropratique à laquelle je travaillais comme adjointe. Pour ma part, mon premier mariage s’était soldé en divorce avec un enfant en garde partagée. J’étais célibataire depuis deux ans et un peu désillusionnée de l’amour.
Nous étions surpris et heureux de ces retrouvailles! Nous nous sommes donné rendez-vous et ce fut le coup de foudre. Nous avons eu la chance d’accueillir un premier enfant ensemble moins d’un an plus tard.
Yanek : Malgré tout, nous ne vivions pas à ce moment-là pour l’amour de Dieu, mais pour l’amour de nous-mêmes… D’une certaine manière, comme le disait saint Luc (chapitre 21, 34-36), nous ne nous étions pas tenus sur nos gardes et notre cœur s’était alourdi dans la débauche et les soucis de la vie. Le filet s’était abattu sur nous: nous avons subi de multiples fausses couches, des burnout, un décollement placentaire pour Chantale, en plus de se marcher sur les pieds dans un quatre et demi devenu trop petit pour une famille de cinq.
Nous avons consulté diverses ressources pour réparer notre couple. Celles-ci nous exhortaient à vivre notre liberté individuelle par l’épanouissement et l’affirmation de notre ego. «Affirme-toi, Chantale! Affirme-toi, Yanek! Dénoncez, revendiquez vos besoins! Vous n’avez qu’une seule vie à vivre!» Et le résultat fut que nous nous accusions mutuellement d’être «toxiques» l’un pour l’autre, un autre mot à la mode! Notre couple était écartelé par ces conseils qui omettaient de mentionner que sans Dieu, on ne peut rien faire. Il fallait rester éveillés et prier.
Chantale : Il y a quatre ans, Yanek me confiait son besoin de se rapprocher de la foi catholique, en quête de sens. Ce fut un choc pour moi, car notre relation s’était étiolée par tous ces défis.
Il me disait des choses comme ceci:
«Je souhaiterais lire la Bible et le catéchisme de l’Église catholique avec les enfants.»
«On m’a souvent appelé le “moine” au travail, car j’ai toujours été attiré par leur ascèse: les biens matériels sont quelque chose d’embarrassant pour moi.»
«Chantale, je souhaiterais m’accrocher au chapelet comme à un pont qui permettra à notre famille de traverser des épreuves sans tomber dans le vide.»
Cela m’a troublée, déstabilisée! Que faisait Yanek de la sacro-sainte Science qui devait toute expliquer de la vie et de l’évolution? Des acquis de la Révolution tranquille qui devait nous donner la liberté une fois pour toutes? Qu’allait devenir notre famille?
Yanek : Imaginez en effet le défi de mettre de l’ordre dans une telle vie où je souhaitais m’assurer de retourner chaque pierre, pour déceler comment se rapprocher de Dieu. Cela me semblait débuter par moi-même et ma propre famille.
Le 4 juin 2024, j’ai rêvé que le Sacré-Cœur de Jésus m’apparaissait. Il y avait une toute petite porte en bois pour accéder à son Cœur chaud. J’avais un sac de problèmes, noir, et je lui demandais quoi en faire. Il me répondait : «dépose-les dans mon Cœur.» Et je lui ai dit, ben voyons donc, je ne peux certainement pas faire ça, je vais le contaminer: «Je ne suis pas digne de recevoir votre Cœur».
Je ne savais pas qu’on pouvait partager ainsi nos problèmes à Dieu.
Chantale : L’Esprit Saint est intervenu pour moi:
Durant ma dernière grossesse, à 8 semaines, j’ai eu de gros saignements. Nous nous sommes présentés à l’urgence, en pleurs et en pleine pandémie, croyant vivre à nouveau une fausse couche. Je précise que la dernière s’était soldée en hémorragie et avait nécessité deux hospitalisations et des transfusions de sang. Quelle ne fut pas notre surprise de constater que le cœur du bébé battait toujours! Toutefois, le placenta était décollé de 60% et les chances de fausses couches étaient grandes. Je devais me tenir tranquille, chose assez difficile pour moi.
Ce fut une grossesse très angoissante et je me suis mise à prier parfois. Je ne savais pas trop ce que je faisais, mais cela me rassurait. J’ai su par échographie que notre enfant serait un autre petit garçon, mais nous ne savions pas comment l’appeler.
Une nuit, j’ai fait un rêve troublant. Je tenais mon enfant dans mes bras et il me disait: «Je m’appelle Jacob!» Au réveil, j’ai raconté ce rêve à Yanek et c’est avec bonheur que nous lui avons donné ce nom. Cela a calmé mes angoisses; je sentais que mon fils vivrait!
Lors d’une visite à Sainte-Anne-de-Beaupré à l’été 2023, j’ai eu envie de m’agenouiller devant ses reliques et de lire la prière du pèlerin. Je repensais à tout ce que j’avais vécu. Je suis ressortie de la Basilique en larmes et bouleversée. Je ne savais pas quoi penser de cette expérience.
Mais plus particulièrement, c’est lors de la messe du 24 décembre 2023 que ma perception a été éclairée par le personnage de Marie que je jouais durant la crèche vivante ici même (à l’église Sainte-Thérèse-d’Avila). C’est alors que j’ai compris: tout était clair pour moi! C’est comme si tous les éléments de mon casse-tête se réunissaient. J’étais assise dans le chœur ici même et mon âme réclamait le baptême! J’ai vécu cela comme une renaissance et cela a également soudé notre couple, car nous nous sommes non seulement fait baptiser et confirmer en famille le 21 juillet dernier, mais nous nous sommes mariés le 27 juillet!
Depuis, je…
Décore la maison par des crèches, des personnages bibliques.
Je m’informe à propos des miracles eucharistiques par le biais de Carlo Acutis qui sera bientôt canonisé lors du Jubilé des adolescents (qui se tiendra à Rome du 25 au 27 avril 2025).
Je lis tous les soirs des livres ou regarde des vidéos qui racontent la vie des saints: saint Padre Pio, Saint-Augustin, saint Charles de Foucault, Sainte Thérèse d’Avila, Thérèse Neumann, Saint-François d’Assise, sœur Yvonne-Aimée de Malestroit pour ne nommer que ceux-là. Leurs histoires me fascinent!
Je fabrique des objets artistiques pour la paroisse comme des rameaux, des cartes géographiques pour les activités de père José (le confrère du Père Tony en visite à notre paroisse cet automne).
J’inclus les enfants à des activités avec Louise Pelletier, notre agente de pastorale et amie.
Yanek : En conclusion, Dieu ne s’est pas révélé à nous par de «petites douceurs». Il s’est présenté à notre famille non comme celui qui apportait la paix, mais l’épée.
Ce que notre famille a appris de notre cheminement de foi jusqu’à maintenant, c’est l’importance de faire confiance au projet de Dieu: le reste suivra. La recherche sans cesse renouvelée de Dieu ne se termine pas pour nous, tout comme nous croyons que la Sainte Famille n’appartient pas qu’à nous; chacun est appelé à la vivre selon son don.
Merci!