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Laisser Dieu faire


Réflexion pour l'évangile du dimanche 29 janvier

4e dimanche du temps ordinaire


Depuis deux mille ans, bien des choses ont changé dans le monde. L’existence et les préoccupations de ces gens que Jésus a côtoyés, au cours de son ministère, peuvent nous paraître à mille lieues de notre propre vie. Et pourtant, chaque fois que nous entendons le passage du discours sur la montagne, nous sommes touchés par l’étonnante puissance des béatitudes. Comme ces hommes et ces femmes qui avaient suivi Jésus sur la montagne, comme tous les hommes de tous les temps, nous aussi, nous avons soif de bonheur. Comme eux, sans doute, nous demeurons stupéfaits et pleins de doute devant cette autre voie du bonheur que vient nous ouvrir Jésus.


Ce doute, nous ne sommes pas les premiers à le ressentir. En effet, si nous avons en commun avec tous les hommes de tous les temps ce désir insatiable de bonheur, nous partageons aussi avec eux les mêmes recettes pour le trouver. Nous croyons, comme eux, que ce sont la réussite et la richesse qui nous le procureront. Nous pensons, comme eux, qu’il vaut mieux être né du bon côté, celui des sages et des gens de milieux favorisés. Et nous estimons, même si nous disons souvent le contraire, que la fin justifie bien les moyens!


En fait, si nous y regardons de plus près, nous devons reconnaître que nous sommes très proches de ces Corinthiens auxquels saint Paul rappelle que cette logique-là n’est pas celle de l’Évangile. Et même, comme nous le rappelle le prophète Sophonie, que cette manière de voir n’a jamais été celle de Dieu.


Nous voilà donc pris au piège de notre propre désir. Nous avons soif de bonheur, nous savons par expérience, que nos propres chemins ne peuvent pas y mener, mais nous n’osons pas croire que celui que nous ouvre Jésus nous soit accessible. En effet, même si les paroles de Jésus nous bouleversent, même si elles font vibrer en nous une fibre très profonde, nous ne parvenons pas à y croire au point d’engager complètement notre vie. Si les béatitudes nous séduisent, reconnaissons-le, elles nous font peur.


Alors, nous restons là, sur le seuil, clochant des deux pieds, hésitant sans cesse, incapables de nous jeter à l’eau, mais incapables aussi de retourner sur nos pas, de croire encore à ces anciens chemins que nos pieds ont trop foulés. Il y a là quelque chose d’étrange et de terrible à la fois. Nous savons où il nous faut aller, mais nous savons aussi que nous sommes incapables de faire le pas. Cela nous semble trop grand, trop beau pour nous! Mais est-ce bien la réalité?


Cela serait sans doute vrai si l’Évangile était une espèce de programme à réaliser, une sorte de concours de vertus. Cela serait vrai s’il nous fallait compter sur nos propres forces, s’il nous fallait devenir, par nous-mêmes, des justes! Saint Paul nous rappelle qu’il n’en est pas tout à fait ainsi. Dieu ne pose pas de conditions pour nous ouvrir les chemins du bonheur. Il n’a pas placé la barre trop haute, mais peut-être, au contraire, bien trop bas, et si bas que nous ne la voyons même plus.


Car ce qu’il nous demande, c’est de le laisser faire en nous laissant faire. Ce qu’il nous demande, c’est de lâcher tous nos songes creux, nos illusions, nos faux orgueils qui font tant de mal aux autres et à nous-mêmes. Il nous demande de cesser de calculer nos chances, de mesures les risques, de toujours nous ménager une porte de sortie. Il nous offre de regarder notre vie avec ses propres yeux, d’y reconnaître ces germes de paix, de bonté, de douceur, de patience qui y sont déjà, et de les laisser grandir. Il nous demande de ne plus avoir peur de rien, ni de nos larmes, ni de nos souffrances, ni de nos doutes, ni de nos échecs. Car il est là, tout près de nous, pour y faire fleurir le bonheur!


Père Tony Solano

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